Safeword

On dit aussi «mot de sécurité» en français mais je me contenterai de sa version anglophone qui est beaucoup plus utilisée. Je ne suis pas là pour réinventer le vocabulaire et inciter à parler qu’en français mais pour expliquer le vocabulaire actuellement utilisé par la communauté.

J’ai mis des années à comprendre le réel intérêt d’un safeword. Jusqu’à récemment je restais à l’écoute du mot «non» et je disais à mes soumis que le mot «stop» me faisait tout arrêter. J’ai fini par réaliser que ça ne me mettait pas suffisament dans une position de domination, me laissant dans l’obligation d’être très attentif à ce qu’un soumis pouvait dire, voire même d’être un peu trop doux. Utiliser un safeword change cette situation et permet d’être beaucoup plus hard. Choisir un safeword c’est accorder une grande importance à ce mot. C’est mettre entre les mains du soumis le choix ultime de tout arrêter.

Sans safeword, pendant une baise bien viril, il n’est pas facile d’entendre clairement le mot «stop». J’ai arrêté mes mouvements plus d’une fois pour être sûr. Avec un safeword je me sens moins alerte, plus apte à lâcher prise. Je sais que le safeword sera clair et évident s’il est utilisé.

Avec un safeword en place, on prend plus conscience de la volonté du soumis de se laisser faire. S’il utilise le safeword c’est soit qu’il n’est pas prêt ou pas dans le bon état d’esprit, soit qu’on va trop loin. Le pouvoir d’arrêter est entre ses mains, c’est établi d’avance, et le domi s’est engagé à respecter l’usage du safeword. Si ça va légèrement trop loin pour le soumis et qu’il se laisse faire, c’est une preuve tangible qu’il se soumet à la volonté du Maître !

Vous pouvez également utiliser deux safeword. Le premier sert pour les cas extrêmes, les limites trop difficiles à franchir. Le second permettrait de prévenir que la limite est proche, que le dominant devrait être prudent. Avec un régulier, on utilise deux safewords et le second permet de dire «J’ai un doute sur le fait que mon copain soit d’accord pour que vous pratiquiez ce qu’on s’apprête à faire». On s’est adaptés à la situation qu’il vit en créant un safeword exprès.

Souvent, le soumis choisit son safeword. C’est mieux ainsi. C’est un mot dont il se souvient et un mot qu’il se voit prononcer en cas de besoin. Le dominant peut demander à choisir un autre mot s’il n’est pas à l’aise avec. Le domi peut également proposer un safeword simple à un soumis débutant qui ne se serait pas posé toutes ces questions.

Pour bien choisir son safeword. Choisissez un mot qui n’aie aucun lien avec le quotidien, aucun rapport avec les trips établis à l’avance, qui ne porte pas à confusion, qui soit facile à prononcer, facile à retenir et facile à comprendre. S’il est possible de le comprendre à peu près correctement d’une bouche baillonnée c’est encore mieux ! Tant que possible, demandez au soumis quel est son safeword avant d’en proposer un.

Les mots de trois syllabes sont les meilleurs. Deux syllabes ça marche aussi. Optez pour des mots avec des sons percutants comme K, T, P, GU, F ou D. évitez de mélanger des sons trop proches, pouvant être confondus entre eux comme CH et F et S, M et N, B et D, R et L. Attention au R qui n’est pas roulé de la même façon par tout le monde.

Portez une attention à ce que votre safeword soit facilement compréhensible. Par exemple « monstre » peut être facilement mâché en le prononçant et ça peut le rendre difficile à comprendre. Alors que « mangouste » est plus évident.

Refusez d’utiliser un safeword qui vous fait rire. Quand il est utilisé, en principe, la situation est sérieuse.
Privilégiez les mots qu’on n’utilise jamais. Vous pouvez même en inventer, même si ça sonne parfois un peu bizarre. Un mot du quotidien peut fonctionner si vous et votre partenaire ne vous en servez jamais dans vos vies civiles. Il faut vous éviter de penser à votre safeword dans une conversation ordinaire. Enfin c’est vous qui voyez mais j’aurais du mal à ne pas penser au mec qui était à mon service tout le weekend dont le safeword est cannelloni, pendant que mes collègues me parlent de leur plat de la veille à base de canneloni.

Des bons exemples :
TNT
Nucléide
Oestrogène (à moins que vous soyiez biologiste ou médecin)
Crocodile
Doliprane
Carapace
Arcane
Capitol

Des exemples inventés :
Dicromaf (bon moi ça me fait rire)
Damikor
Toripom
Korik

Des mauvais exemples :
Foie de boeuf (essayez de le prononcer vous verrez)
Girondin (à moins de ne jamais parler de girondins dans votre vie)
banane (d’accord ça peut fonctionner mais je le trouve trop facile à mâcher)
stop (j’ai longtemps cru que c’était bien mais en fait non)
non (on utilise un safeword pour que le mot « non » puisse être ignoré, que le refus fasse partie du jeu, donc non, pas « non »)

Une autre idée peut être d’utiliser des noms de couleurs. «Rouge» reste un mot plutôt compréhensible. C’est pratique avec un partenaire qu’on voit peu. Dans une relation sur la durée, voire une relation où le soumis est constamment dans son rôle, on peut être amené à dire rouge à tout moment.
Je propose parfois Rouge et Orange. Rouge veut dire que je suis allé trop loin, je fais tout pour ne pas l’entendre. Orange veut dire que je m’approche de la limite. Selon la relation et les pratiques, je pourrais chercher à entendre Orange quasiment tout le temps sans jamais entendre Rouge. Utiliser ce système permet d’avoir un feedback, à condition que le soumis s’exprime régulièrement et clairement !

Le safeword sert de feedback quand on frôle les limites mais on peut chercher à obtenir un feedback plus fin, juste pour savoir comment se sent le soumis. Par exemple dans un bondage contraignant on peut lui demander comment il se sent sur une échelle de 1 à 10. à 10 c’est que tout va bien. à 1 c’est que c’est très très dur à supporter. Dans cette situation on peut éviter d’entendre un safeword en prenant une autre direction. Ça sera aux maîtres de jouer avec les subilités que ces deux outils apportent.

Explorer les safewords et leurs usages, adaptez-les à votre situation !

Les safewords sont courants et très utile, voire même nécessaire !